Martinus est né en 316 dans une place forte romaine stratégiquement
située sur une plaine danubienne près de la frontière de l'empire
en Hongrie actuelle. Son père, Servius, officier supérieur et tribun
militaire le met dès sa naissance sous la protection du dieu de la
guerre : sa vie professionnelle est tracée, il sera soldat.
En 313, l'empereur Constantin 1er le Grand, avait établi la liberté
religieuse mettant fin ainsi aux persécutions des chrétiens.
Vers 326, le père de Martinus est nommé à Pavie, ville de la plaine
du Pô au nord de l'Italie. Martin, âgé d'une dizaine d'années a ses
premiers contacts avec la nouvelle religion libérée.
En effet, grâce à Constantin, le christianisme a le vent en poupe
: ne vient-il pas de convoquer le concile oecuménique de Nicée, oû
l'on décide que l'Église sera l'un des principaux soutiens
de l'état. L'Empire se transforme ainsi en une monarchie de droit divin.
Martin a 15 ans. Il découvre les Évangiles et se prépare au
baptême. Cependant, son père lui rappelle sa carrière et l'incorpore
à l'école de la garde impériale à cheval, il fera ses classes à Trêves.
Nommé légionnaire, il prête serment à l'empereur et part en garnison
pour l'Italie puis la Gaule Pendant toute cette période, ses chefs
le reconnaissent excellent officier, déjà, il aide les faibles, distribuant
son argent aux pauvres, soulageant les misères des malheureux et soignant
les malades. Sa vie de tous les jours est simple, sans luxe ostentatoire,
il traite son unique serviteur avec grand respect, en frère.
C'est en Gaule que se situe l'acte qui le symbolisera pour des siècles.
Lors d'une patrouille près d'Amiens, Martin rencontre un vieil homme
grelottant de froid. Avec son épée, il coupe son manteau et lui en
donne une moitié. Une nuit suivant l'évènement, Martin fait un songe
dans lequel lui apparaît le Christ prononçant ces paroles : " en couvrant
ce vieil homme, c'est moi que tu as couvert ". Cette apparition lui
semble une invitation à se rapprocher de Dieu.
Le samedi Saint de l'année 334, il est baptisé et confirmé. Sa vie
de militaire l'entraîne à voyager et en août 336, il se trouve à Worms
où l'armée romaine tente de s'opposer aux invasions barbares. Il propose
à l'empereur César Julien de se porter seul à la rencontre des rangs
ennemis sans armes ni protection, hormis celle de sa foi envers le
Seigneur. Pris pour fou, il est enfermé dans une cellule. Mais le
lendemain, au lever du jour, l'ennemi se retire et envoie des messagers
de paix. Les Chrétiens voient en ce revirement de situation un miracle
divin et l'empereur manifeste son trouble en libérant Martin.
En 356, le légionnaire Martin quitte définitivement l'armée et se
rend chez Hilaire, évêque de Poitiers, qui lui confie la fonction
d'exorciste. Puis il se rend en Italie pour voir ses parents et où
il s'oppose aux ariens. A l'instar d'Hilaire, déporté en Asie Mineure,
Martin est arrêté, fouetté et envoyé en résidence surveillée sur une
île au large de la côte ligure.
En 360, Hilaire, gracié par l'empereur, regagne Poitiers où Martin
le rejoint. Ce dernier fonde un ermitage à Ligugé. De nombreux adeptes
le rejoignent car le but de Martin est de former des disciples et
de les envoyer en mission auprès des païens. Pendant 10 ans, ce premier
monastère gallo-romain, dont les adeptes prêchent la parole de Dieu
dans toute la région, génère de nombreuses conversions poitevines.
Son audience devient de plus en plus importante car Martin fait de
nombreux miracles: on parlera même de la résurrection de deux morts.
En 371, l'évêque Saint Lidoire, venant de mourir, les habitants de
Tours font appel à Martin pour le remplacer. Dans un premier temps,
Martin refuse, se trouvant indigne de la fonction et peu disposé
à quitter sa congrégation et ses disciples. Un subterfuge organisé
par un tourangeau permet de le faire sortir de son monastère et on
l'emmène sous bonne garde jusqu'à la Cité. Les hauts dignitaires épiscopaux
dont l'évêque d'Angers critique ce choix mais le petit peuple manifeste
son profond attachement à Martin qui est finalement consacré.
Le nouvel évêque gère son diocèse avec intelligence et habileté mais
dans cette ville de 10 000 habitants, il s'ennuie de Ligugé. Alors,
il traverse la Loire et fonde sur l'autre rive un nouvel ermitage,
ce sera Marmoutier.
Cette nouvelle communauté défriche, construit, étudie religion et
sciences humaines. De son éducation militaire puis d'officier dans
les légions romaines, Martin a conservé le sens de l'organisation
: il lance ses missionnaires parmi les païens. Et les nouvelles paroisses
fleurissent : Saunay et Amboise, Langeais et Candes, Tournon et Ciran.
Les temples païens sont démolis ,souvent remplacés par des chapelles
ou des églises, ceci à l'instar de Saint Martin de Laives qui sera
construit en lieu et place d'un temple gallo-romain dédié à Mercure.
Martin voyage beaucoup, se portant à la tête de ses " légions de
moines " détruisant les idoles et convertissant les âmes dans trois
directions principales : la première Chartre - Paris - Reims et Trèves,
la seconde, notre chère Bourgogne - Lyon - Vienne et enfin la troisième
avec l'Aquitaine. Il fréquente conciles et synodes épiscopaux. Empereurs
et hauts dignitaires respectaient ou craignaient Martin non seulement
en raison de ses saintes paroles mais pour ses actes miraculeux médiatisés
par ses biographes successifs que furent Sulpice Sévère ancien avocat
de Bordeaux, Paulin de Périgueux, Venance Fortunat et enfin plus tard
le célèbre Saint Grégoire également également évêque de Tours(593
à 594).
Si les statues, peintures et dessins représentent souvent Martin
à cheval lors de son geste symbolique coupant son manteau en deux,
pendant sa période religieuse, il est représenté se déplaçant sur
un âne. C'est ainsi que beaucoup de représentants de la gente asine
doivent leur nom à ce grand voyageur.
En automne 397, Martin se rend à Candes " car les clercs de cette
église se querellaient ". Après avoir rétabli la paix " il songe à
revenir au monastère de Marmoutier quand les forces de son corps commencèrent
tout à coup à l'abandonner ". Tous pleuraient autour du mourant qui
fit cette dernière prière :
" Seigneur, si je suis encore utile à ton peuple, je ne refuse pas
le travail. Que ta volonté soit faite ". Il avait 81 ans.
Martin décédé, le saint corps semble avoir été l'objet de convoitises
entre poitevins du monastère de Ligugé et Tourangeaux. Une fois de
plus, ce furent ces derniers qui, par ruse - d'après Saint Grégoire
de Tours - le transportèrent dans une barque par la rivière Vienne
puis Loire jusqu'à Tours. Ses funérailles se déroulèrent dans cette
ville le 11 novembre 397.
Une liturgie particulière allait être célébrée en son honneur
: la Saint Martin d'été le 4 juillet qui correspond à la messe annuelle
dite à Saint Martin de Laives et la Saint Martin d'automne le 11 novembre
- souvent absente des calendriers car remplacée par l'Armistice de
la grande guerre- dates qui rythmaient tant d'habitudes en particulier
rurales, mais ceci est une autre histoire.
En conclusion à cette rapide biographie de Saint Martin, voici
un texte écrit lui aussi par un bourguignon :
"Confesseur par ses mérites, martyr par ses souffrances, apôtre
par ses actes, Martin règne glorieux dans le ciel, et ici dans son
tombeau; qu'il se souvienne, et qu'effaçant les péchés de notre pauvre
vie, il cache nos fautes sous ses mérites ".
Epitaphe de Saint Euphrone, évêque d'Autun pour la tombe de Saint Martin 473